Soldat allemands inhumés dans le carré militaire du cimetière St. Lazare (Bourges)

Saint-Loup 24 Août 1942

En début de nuit un bimoteur Douglas « Boston » Mk-III du No.418 Squadron piloté par le P/O Hugh D. Venables décolle de sa base de Bradwell Bay (dans le comté de l’Essex, Angleterre) pour une mission Intruder. Il s’agit d’une patrouille offensive destinée à rechercher et à détruire des avions ennemis au-dessus de La France occupée. La zone prévue cette nuit-là couvre un territoire allant d’Orléans à Avord.
 
Au-dessus de la Manche le bombardier tombe en panne de générateur. Le pilote pense tout d’abord faire demi-tour mais après avoir coupé les équipements électriques non indispensables il décide de continuer la mission. La côte ennemie est franchie à 22h10 au niveau de Saint-Valéry-en-Caux puis la Seine est atteinte à l’ouest de Rouen. Le vol se poursuit ensuite en direction de Melun et près de Mézières sur Seine l’appareil entame son virage pour gagner Orléans. Sur son trajet l’avion passe entre la base de Châteaudun et un terrain d’aviation factice à l’ouest de Bricy qui est reconnu facilement du fait de la manière dont sont allumés et éteints ses feux de signalisations. L’avion patrouille durant une dizaine de minutes dans le sud-ouest d’Orléans sans qu’aucune activité ennemie ne soit remarquée. Finalement le pilote se décide à gagner le secteur de Bourges Avord.
 
Boston du No.418 Squadron de la RCAF
 
Entre Sully-sur-Loire et Aubigny-sur-Nère l’équipage anglais croise La route d’un appareil inconnu et le P/O Venables s’engage immédiatement dans son sillage. Avec l’aide de la lune cet avion qui vole à environ 700 mètres sur l’avant du Boston est tout d’abord identifié par ses dérives et son aile mi-haute. Mais afin d’avoir confirmation du type d’appareil, le pilote se rapproche de l’avion inconnu à une distance avoisinant les 250 mètres pendant que ce dernier, qui apparemment ne se doute de rien, poursuit sa route en un très léger piqué.
 
Son identité est rapidement validée comme étant celle d’un Dornier Do-217 du fait de ses contours et des flammes qui sortent de ses échappements. Le tir est alors immédiatement déclenché à l’aide de toutes les armes de bord, mitrailleuses et canons, mais ces derniers refusent de fonctionner. Malgré tout, l’équipage aperçoit clairement des coups porter sur le fuselage. Après un rapide contrôle des systèmes de tir, le pilote déclenche une deuxième salve de toutes ses armes mais encore une fois les canons restent muets. Plusieurs impacts dus aux tirs des mitrailleuses sont encore observés sur l’avant et la section centrale du fuselage de l’appareil ennemi avant que le Boston – qui est maintenant à moins de cinquante mètres - ne décroche sur bâbord afin d’éviter une collision en plein vol.
 
Le Boston entame un virage serré afin de revenir en position et procéder à une nouvelle attaque mais durant son virage il perd le contact. L’ennemi a été aperçu une dernière fois quelques secondes après la dernière attaque et il volait toujours dans la même direction mais cette fois dans un piqué beaucoup plus prononcé. Après une recherche poussée durant laquelle aucun signe d’activité n’est remarqué, le Boston quitte la zone à 23h55 en survolant la Loire jusqu’à Orléans puis remonte vers la Seine. Le bimoteur qui a largement dépassé son heure estimée d’arrivée vire ensuite à gauche pour éviter Paris. En passant près du terrain de Villacoublay l’appareil essuie des tirs denses et précis des batteries de Flak légère qui défendent cet aérodrome. Ensuite le Boston passe au nord de Rouen pour franchir la côte une nouvelle fois à hauteur de Saint-Valéry-en-Caux et le P/O Venables pose son appareil à Bradwell Bay vers 1h30. A noter qu’il a finalement réussi à faire fonctionner ses canons alors qu’il volait au-dessus de la Manche !
 
Après examen, les raisons du non fonctionnement des canons ne sont pas clairement expliquées. Le levier de tir est tordu, ce qui est certainement dû à Venables lorsqu’il a essayé de faire fonctionner ses armes. Il avait eu lors d’une sortie précédente les mêmes ennuis avec ses canons et avait contrôlé avant le vol son armement; ses canons étaient donc opérationnels. Venables signale aussi que le levier de mise à feu est assez dur à manier.
Qu’est-il advenu de l’appareil ennemi ?
 
Cette nuit-là les allemands n’ont aucune perte d’enregistrée sur ce secteur. Il se pourrait que l’appareil engagé par le Boston soit un appareil anglais en mission S.O.E., une mission au profit de la Résistance. Cette nuit-là on note le crash d’un bimoteur Armstrong Whitworth « Whitley » appartenant au No.138 Squadron de la RAF à 0h30 près de Saint Loup (Loir&Cher). La particularité de cet appareil ? De nuit sa silhouette peu le faire passer pour un Dornier Do-217 !
 
L’histoire se termine bien pour tout l’équipage Anglais qui parvient à évacuer l’appareil avant qu’il ne se crashe puis, aidé par la population et un réseau d’évasion, atteint Gibraltar vers la fin septembre 1942.