Soldat allemands inhumés dans le carré militaire du cimetière St. Lazare (Bourges)

Avord 4 - 5 Juillet 1944

4-5 Juillet 1944 - Dans la soirée du 4 juillet 1944, dix-huit Mosquitoes sont envoyés en France afin de harceler les lignes de communications et le trafic nocturne des aérodromes allemands. Ce type de mission de nuit est appelé Intruder dans le jargon de la RAF.
 
L’un de ces appareils nous intéresse plus particulièrement ; il s’agit d’un Mosquito du No.487 Squadron de la RNZAF (Royal New-Zealand Air Force), le NT131 portant la lettre individuelle D. Son équipage est composé d’un pilote néo-zélandais et d’un navigateur anglais, les Flying Officers Ron Beazer et Andy Munro. Leur bimoteur a décollé de la base de Thorney Island dans le Hampshire pour se diriger vers le Centre de la France, le secteur d’opération assigné à l’équipage pour cette nuit-là.
 
La nuit est bien avancée lorsque l’équipage qui survole à basse altitude la voie ferrée Bourges-Nevers arrive à proximité du village d’Avord et de sa base aérienne allemande. Les rails sont faciles à suivre par cette nuit de pleine lune mais ce vol à basse altitude rend aussi l’avion très vulnérable aux éventuels tirs en provenance du sol.
 
Peu après avoir passé le village, et avant d’atteindre le lieu-dit Le Grand Aubilly, l’équipage mitraille un objectif - un témoin parle d’un train – puis vire sous forte inclinaison pour effectuer un second passage sur la cible. Le même témoin se rappelle […] L’avion était très bas, à moins d’une trentaine de mètre du sol et je me rappelle encore très bien le reflet bleuté de son intrados. […] Il est très vraisemblable que les bruits d’avion et de mitraillage aient alerté les artilleurs de la Flak (la DCA allemande) qui défendent la base.
 
Vus ici le 29 février 1944, trois Mosquito FB VI du No.487 Squadron menés par le Wing Commander "Blackie" Smith à bord du MM417 / EG-T. On aperçoit au fond le NT131 / EG-D piloté par le F/O Beazer la nuit du 4-5 juillet 1944.
 
Les unités de défense anti-aérienne allemandes d’Avord sont sur les dents car elles sont régulièrement provoquées par les chasseurs alliés qui rodent dans le secteur, alertes aériennes en forte progression depuis le débarquement de Normandie intervenu voilà maintenant presque un mois. 
 
La base qui abrite toujours des avions "éclaireurs" du I./KG 66 (1er Groupe du Kampfgeschwader 66) sert aussi ponctuellement de terrain de transit pour les bimoteurs Junkers Ju 88 des Kampfgeschwadern 26 et 77 qui – depuis leurs bases du sud de la France – interviennent sur la ligne de front normande. 
 
Aérodrome de déroutement aussi à l'exemple des Junkers Ju 88 du II./LG 1 (2ème Groupe du Lehrgeschwader 1) qui ont atterrit à Avord durant la nuit du 17 au 18 juin, au retour d’une opération en baie de Seine, leur terrain des Pays-Bas ayant été la cible d’un bombardement allié. 
 
Avord reste donc un terrain bien protégé.
 
C’est alors qu’il effectue sa deuxième passe que le Mosquito est touché par des tirs de Flak […] Je me souviens des gerbes de traceurs montant à environ 45 degrés […] dit encore notre témoin. L’intensité des tirs de Flak ainsi que l’altitude de vol ne laissent guère de chance à l’équipage dont l’appareil en flammes s’écrase près de l’Yèvre, la rivière qui coule entre le village d’Avord et l’aérodrome - au lieu-dit Cayenne.
 
Preuve de l’intérêt que suscite l’activité aérienne ennemie sur l’aérodrome d’Avord – et par un curieux hasard de circonstances - un Mosquito du No.418 Squadron Canadien est lui aussi en opération dans le secteur (les F/L Kerr et F/O Clark). 
 
Après avoir abattu un Junkers Ju 88 aux environs de Châteaudun, et alors qu’il approche de la base, son équipage va assister – sans connaitre la nationalité de la victime - à la fin tragique de l’équipage du Squadron néozélandais.
 
Le Flying Lieutenant Jim Kerr, pilote, raconte […] Nous avons poursuivi vers l’aérodrome d’Avord et à deux heures zéro deux, alors que nous étions en approche et qu’il nous restait encore trois ou quatre kilomètres à parcourir, nous avons aperçu quatre canons ouvrir le feu sur un avion se trouvant au-dessus de la base, appareil qui avait été pris dans les faisceaux de deux projecteurs. Des tirs l’ont atteint et l’instant d’après une quinzaine d’autres canons de Flak légère ont ouvert le feu. L’avion a explosé et s’est écrasé au milieu de l'aérodrome. […]. L’équipage Canadien, vu l’effervescence qui règne sur Avord, poursuit sa mission sur le secteur de Bourges sans y rencontrer d’activité particulière et se pose sur sa base anglaise peu avant quatre heures du matin.
 
Le Mosquito abattu brûle une bonne partie de la nuit et des décombres sont retirées les dépouilles des deux aviateurs, qui seront inhumées au cimetière communal d’Avord. 
 
Ces deux aviateurs alliés étaient expérimentés car le Flying Officer Ronald Charles Ostend Beazer comptabilisait environ trente-cinq missions à l’ennemi et son équipier, le Flying Officer Andrew White Munro, navigateur aguerri, avait auparavant servi au sein du No.139 Squadron.
 
Durant l’année 2007, en hommage à leur sacrifice et pour leur rendre honneur, la municipalité d’Avord décide de nommer deux rues du village à leurs noms.